Claude Labbé

Abuelo

Roman

L’enfant est fasciné par le personnage sur lequel des rumeurs se propagent, liées à son rôle durant la Guerre d’Espagne et à son séjour de dix années dans l’URSS stalinienne. Le vieux guerrier proscrit au parcours tumultueux projette dans le jeune garçon le souvenir de ses trois enfants assassinés par les franquistes.
Une relation d’affection naîtra de leurs rencontres secrètes au cours desquelles l’éternel rebelle fera le récit de ses combats et de ses aventures.
50 ans plus tard, François revient sur les traces de son enfance insulaire. Une nuit entière, entre rêve et réalité, depuis l’une des plus belles maisons de l’île où il s’est installé pour écrire ses souvenirs, il fait ressurgir une galerie de fantômes autour de celui qui fut son grand-père d’adoption, son Abuelo : le général El Campesino.

Critiques du roman:

« Un roman sensible, plein d’humanité et de tendresse. Un huis-clos de la mémoire, un espace-temps de la construction de sa mémoire affective. »

Isabelle Farré, libraire. Librairie de l’If à Paimpol.

« J’ai été captivé par le récit d’Abuelo qui se rattache à un genre qui a laissé de grands précédents, celui des récits initiatiques d’un enfant qui vit des évènements qui vont s’inscrire au plus profond de lui, sans que sur le moment il puisse comprendre la nature réelle de ceux-ci, mais qui néanmoins seront structurant pour sa vie intérieure d’adulte. »

Michel Espagnon. Docteur en droit. Ancien Directeur juridique de Finatef.

« Claude Labbé a un talent de poète quand il évoque des objets, des phénomènes, des paysages et réussit à les révéler au lecteur (à qui on ne la fait pas) à les faire réapparaitre dans un monde neuf et sensible, alors même que celui-ci n’y voyait plus rien. L’homme-soldat autour duquel est organisé son roman est extraordinaire et ses parts d’ombre confirment son statut de héros moderne. Figure révélatrice d’un long moment où la violence absolue était pour certains une condition nécessaire d’existence (maintien de la vie et maintien d’un idéal). Il a raison de ne jamais le juger.
Est-ce pour cela qu’il a choisi d’aborder ce personnage à travers les yeux innocents d’un enfant ? »  

Dominique Lion, architecte, auteur.

« Abuelo »me fait penser à une sorte de « Petit Prince » avec un enfant fasciné par un personnage de quasi-fiction avec une île à la place du désert. Il y a des passages très poétiques sur l’île, les marées, la nature, les oiseaux. »

MYL ex Président Directours

« Ce beau roman nous transporte vers l’île de Bréhat, magnifique « île aux fleurs » avec ses beautés, ses mystères, ses rudesses, … C’est l’histoire (…) tendre entre deux êtres privés, pour l’un de l’amour et d’une figure parentale forte, et pour l’autre, d’une famille arrachée par l’horreur franquiste. Elle révèle, avec beaucoup de sensibilité, un auteur dont on pressent la grande proximité avec le jeune héros.
Une écriture sensible, fluide pour un premier roman qu’on ne lâche pas avant la dernière page. Un auteur à suivre. »

FKieffer (Babélio).

« Abuelo est une aventure humaine et politique passionnante. L’auteur nous fait découvrir, par les yeux du jeune François, l’île de Bréhat et la rencontre avec ce mystérieux vétéran de la Guerre d’Espagne qu’il appelle Abuelo. Le livre révèle que nous sommes tous au fond de nous aussi curieux que le jeune François et que nous gagnerions tous à adopter un peu de l’esprit révolutionnaire d’Abuelo. »

Ourouk J (Babélio)

« Dans les brumes et les lumières de l’île de Bréhat (tout ça ne peut advenir que sur une île), l’auteur convoque l’enfant dont il se souvient (ou croit, ou imagine avoir été) pour reconstruire avec lui la légende obscure d’un certain général El Campesino. La mise en fiction fonctionne bien, construite sur une documentation rigoureuse. On se laisse joliment entrainer sur les traces, inventées ou non, d’un héros d’enfance, d’une figure parentale marquante, indélébile.
Un premier roman à risque et … réussi !

P. Novarina (Babélio)

Le personnage d’El Campesino

Héros pour les uns et brute criminelle pour les autres, Valentin Gonzales reste une « figure » de la Guerre d’Espagne. Pour plus d’informations, voir la page que Wikipedia lui consacre : Valentín González — Wikipédia (wikipedia.org)

Valentin Gonzales est l’auteur de deux livres :

  • La vie et la mort en URSS, paru en 1950 avec l’appui de Julian Gorkin, qui relate son séjour de 10 années en URSS, depuis son accueil triomphal par Staline en 39 jusqu’à son ultime évasion du goulag en 49.
  • Jusqu’à la mort, Mémoires, paru en 1978, avec la collaboration de Maurice Padiou ; il s’agit d’une autobiographie. Bien que vraisemblablement enjolivé par endroits, le parcours du Campesino mériterait 2 choses : un vrai travail de décryptage de la vérité historique (et notamment le déroulement des 10 années en URSS – mais ça ne va pas être facile compte tenu de la dissolution récente de l’antenne russe de l’ONG Memorial), mais aussi l’écriture d’un scénario de film d’aventure (scénariste de tous les pays, unissez-vous !).

Extrait du roman :

« La nuit commençait à tomber quand ils entendirent soudain des cris déchirants. Un homme appelait à l’aide et c’était en provenance de la direction du bourg. Son père se précipita du côté des appels et l’enfant se mit à courir derrière lui. A deux cents mètres, là où la route principale se divisait en deux, tout un chargement avait versé sur le fossé. Le tableau était désolant : la cargaison de pommes s’était répandue sur la route, un essieu était brisé et la lourde caisse en bois désarticulée, une roue en l’air. Le charretier était parvenu à sauter à temps de son siège, évitant ainsi de se faire écraser sous le chargement. Il était assis sur la route, au milieu des pommes. Il se tenait la jambe en gémissant tout en observant, dubitatif et comme halluciné, l’angle insolite qu’accusaient les deux parties de son tibia. Le Grand Michel ordonna aux hommes qui les avaient rejoints d’emmener immédiatement le charretier chez la doctoresse.
Le spectacle du cheval, éclairé par deux ou trois rais de lampes-torches, était pathétique. L’animal , couché sur le bas-côté de la route encombré de fougères, prisonnier de son attelage, avec son ventre énorme et ses pattes archaïques, se débattait par secousses brutales en faisant vibrer tout ce qui restait de la caisse du tombereau. Une partie du talus, labourée par les violents coups de sabots, avait pris des allures de tranchées après un pilonnage d’obus. Le cheval poussait des hennissements rauques après chaque tentative avortée pour s’extraire du fossé. Sa robe trempée, fumante sous la pluie, couverte de boue, le souffle saccadé, les naseaux dilatés et la gueule pleine d’une écume gluante.
Il revoit son père armé d’un poignard impressionnant s’avancer vers l’animal dont les soubresauts redoublaient d’intensité. Un seul coup de patte ou de tête pouvait être fatal à l’homme qui s’approchait. Avec une détermination calculée, il trancha d’un geste nerveux plusieurs sangles puis s’écarta d’un brusque bond en arrière. La bête, la crinière amalgamée par paquets visqueux, se dégagea dans une ultime secousse avec une violence incroyable, arrachant le reste des liens de cuirs qui la maintenaient prisonnière, cassant du même coup l’un des brancards comme s’il s’agissait d’un simple fétu de paille. Subitement debout et libéré, le cheval resta une seconde ou deux immobile comme s’il ne croyait pas vraiment à cette nouvelle liberté, le cou curieusement orné de son collier pointu en cuir, les yeux masqués par ses œillères, puis il partit dans un galop lourd s’enfuyant comme fou sur la route obscure, poursuivi un instant par le faisceau des lampes-torches. »

{
Nous sommes libres de changer le monde et d’y introduire de la nouveauté.

– Hannah Arendt (1906-1975)